Énergies fossiles

Évolution passée, présente, et future de la disponibilité en pétrole.

L’’impératif climatique voudrait que l’Homme s’impose un sevrage draconien de pétrole. Mais malgré des décennies de conscientisation, la société est toujours aussi dépendante au pétrole, et la demande poursuit sa croissance. Dans l’imaginaire collectif, le montant des réserves garantit notre consommation pour des décennies. Pourtant, il n’y a pas de lien évident entre le montant des réserves et les débits. Et c’est bien de 11 millions de litres par minute que le monde a besoin pour fonctionner, alors que les gisements traditionnels s’essoufflent. Les premiers signes de contraintes géologiques sur les débits eurent lieu en 2004-2008, lorsque la production de pétrole conventionnel cessa de croître et ne répondit plus aux hausses de prix. Le brut atteignit des prix inédits, prenant par surprise une société impréparée à l’arrêt de la croissance de la disponibilité en pétrole bon marché – ne parlons pas encore de déclin. S’ensuivirent de graves problèmes socio-économiques. Mais les pétroliers investirent massivement. Le déclin de la production conventionnelle fut endigué, de nouveaux pétroles comme ceux dits de schiste inondèrent les marchés, et les prix refluèrent. Ça fait maintenant 5 ans que les prix sont bas, et ces 5 années suffirent pour oublier. Mais à ces prix, il est difficile d’empêcher le déclin du conventionnel et les pétroles dits de schiste épuisent financièrement les compagnies pétrolières. A cela s’ajoutent les contraintes géopolitiques, dont les effets éclatent lorsqu’elles ont mangé les capacités excédentaires de production et rogné le baril marginal responsable des prix. À ce moment-là, elles dominent le discours politique et médiatique, et camouflent le rôle des contraintes géologiques, techniques, économiques, et financières qui nous conduisent vers d’autres chocs de prix, et à la longue, vers un plafonnement de la production pétrolière mondiale, puis vers un déclin qui s’étirera peut-être sur 150-200 ans. Sommes-nous prêts à ces événements ? Un autre scénario est-il possible ? Quel sera le rôle des politiques climatiques ?

Par Patrick Brocorens (UMons)